“Les objets connectés sont des machines à transformer les phénomènes, le corps et, finalement, le monde lui-même en data disponibles. Par les maléfices du mot «donnée», ils présentent cette transformation abstraite en expérience réelle et indiscutable. Contrairement à ce que l’on pourrait croire, ces données ne sont pas des phénomènes à partir desquelles le sujet élabore un savoir sur lui-même, elles forment déjà un savoir fabriqué de toutes pièces par un algorithme. On les croit d’autant plus naturelles qu’elles seront bientôt incorporées : à la question de savoir «qui je suis», il n’y aura plus alors d’autres réponses que celles élaborées dans le langage des machines. Si l’on veut éviter que ce langage devienne celui de toutes nos expériences, il faudra réapprendre à percevoir le sensible sous les data. Cela implique sans doute de reprendre ce que les techniques nous ont si généreusement «donné».”
Michaël Fœssel in Libération.